Alors qu’un nouveau contrat de DSP est en négociation pour 2017, il est urgent de dresser un bilan des 14 années passées. Bilan qui implique non seulement les élus mais aussi les habitants de l’agglomération dijonnaise quant à la gestion, aux investissements et aux objectifs à fixer pour notre réseau commun de transports urbains. Les enjeux sont immenses et variés pour les usagers du service public, qu’ils soient économiques, sociaux ou environnementaux.
Partout en France, les collectivités territoriales reviennent peu à peu sur cette mode idéologique des DSP. Dernière en date dans le domaine des transports publics, l’agglomération d’Annecy qui vient de reprendre la main ce 1er janvier 2016 sur son service public de transport en créant une SPL (société publique locale), mettant fin à 35 ans de DSP. D’autres modèles existent avec, par exemple, le retour en régie publique dans laquelle sont associés à la gestion du service public les élus, les employés et les usagers. Cette tendance au retour à la gestion directe des réseaux de transport public n’est pas un saut dans l’inconnu pour la collectivité. L’association AGIR, fondée en 1987 par des professionnels du transport public, élus et techniciens, met à disposition des collectivités territoriales une offre de service (la fameuse « expertise » tant louée par nos représentants) indépendante des groupes de transports qui se partagent les marchés des DSP. Aujourd’hui elle compte 192 adhérents comme les agglomérations de Troyes, Poitiers Toulouse, Nice ou Belfort.
Le retour à une gestion directe du réseau de transport public est une possibilité qui ne doit pas être écartée du débat démocratique local. A l’heure où les hausses de tarifs se succèdent pour les clients des bus et tramways du Grand Dijon et où les impôts locaux vont connaître également une hausse (pour les usagers de ces mêmes transports public), la pertinence et la soutenabilité de tels contrats avec des acteurs privés est, pour le moins, à re-mettre sur la table.
Alors que Kéolis-Dijon verse des sommes toujours plus grandes à sa maison-mère, qu’elle ambitionne pour 2017 d’atteindre les 7 milliards d’euros de chiffre d’affaire, que l’entreprise a sommé les élus de revoir à la hausse les tarifications des voyages sur le réseau pour maintenir ses bénéfices prévisionnels, et que le Grand Dijon rémunère par ailleurs plus de 48 millions d’euros par an le service rendu par la filiale de la SNCF, la pertinence économique de ce modèle est discutable. Le « client-usager » est, en fin de compte, perdant sur toute la ligne. Et comme le rappelle nos élus, le service public de transport est par essence déficitaire, c’est donc bien que sa raison d’être est ailleurs, et non financière !
Le retour en régie publique donnerait les coudées franches au Grand Dijon pour fixer les tarifs, sans la pression d’un délégataire privé. La gratuité totale du service public de transport est un objectif atteignable qui stimulerait l’utilisation du réseau. Selon le rapport du Bureau d’Etude en Transport et Déplacement initié dans le cadre du Programme de Recherche et d’Innovation dans les Transports Terrestres de la politique des transports, publié en janvier 2007, la gratuité est l’un des facteurs centraux jouant sur la fréquentation totale du réseau de transport. Ce rapport montre que pour les agglomérations de plus de 100 000 habitants (comme Dijon) « le passage à la gratuité totale est plus difficile […], sauf pour les réseaux où le versement transport n’est pas à son maximum ainsi que pour ceux où les recettes commerciales sont assez faibles (ce qui était le cas à Dijon avant le second contrat de DSP car elles ne couvraient que 18% du coût de fonctionnement). En revanche, du fait de la persistance (à la hausse) de recettes commerciales, la mise en place d’une tarification attractive peut plus facilement y être envisagée. » A minima, une tarification simplifiée est proposée dans le rapport comme modèle avec le ticket unitaire à 1 euro, l’abonnement mensuel à 15 euros, l’abonnement annuel à 120 euros ainsi que la gratuité totale pour certaines catégories de la population (enfants ; étudiants ; + de 65 ans ; chômeurs…). En contrepartie, des « rentrées financières » sont possibles comme par exemple en mettant à contribution les bénéficiaires privés des dessertes de ce réseau de transport comme les grandes surfaces commerciales de Quetigny, de la Toison d’Or ou de Chenôve. Les dépenses publicitaires et les frais de siège seraient également à déduire…
La hausse de fréquentation du réseau de transport liée à la gratuité permettrait aussi d’améliorer le cadre de vie des dijonnais en réduisant l’usage de l’automobile dans l’agglomération. Les expériences de gratuité imposées par la municipalité lors des pics de pollution des 15 et 16 mars 2014 en avaient montré l’impact avec des taux de fréquentation historique ! Politique environnementale, de développement durable comme on l’entend si souvent dans la bouche de nos élus, bien plus concrète et efficace que le pelliculage à 7000 euros d’une rame de tram pour faire la promotion de la conférence climat (COP21) de novembre-décembre dernier.
Enfin, dans une agglomération où plus de 20 000 habitants vivent sous le seuil de pauvreté, la gratuité ne doit plus être assimilée à de « l’assistanat », vocable méprisant qui se banalise. La gratuité doit devenir totale notamment pour les plus jeunes de nos concitoyens, de l’école à l’université, qui n’ont d’autres moyens de transport (et pas ou de très faibles revenus propres) que les bus et le tram. Nos concitoyens qui vivent au quotidien la précarité doivent pouvoir accéder gratuitement aux services publics sociaux, que ce soit le Pôle Emploi, la CAF ou les services administratifs.
Il y a toujours des alternatives, les nier ou les repousser d’un revers de main sans débat démocratique n’est que le témoignage d’une posture idéologique qui n’a que trop souvent cours à tous les niveaux de décisions. Pour une reprise en main de nos services publics, pour une autre vision de la vie en société qui proclame l’Humain d’abord, pour un retour des citoyens dans la gestion collective de nos biens communs, pour reprendre le pouvoir !
Le retour en régie publique du réseau de transport collectif dijonnais, c’est maintenant !
Le Parti de Gauche de Côte d'Or.